Le cynisme politique

 

« Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Les méthodes du genre de celles d’Hitler sont dépassées. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes.

 

L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées (cf. les individus de type alpha, bêta, gamma). Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle.

 

Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter.

 

Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste.

 

Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie.

 

Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. (cf. le rôle de la drogue et du sexe dans le roman de Huxley).

 

En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir  une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté.

 

Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur.

 

L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau. »

 

Dr Serge Carfantan [Agrégé de philosophie] – 2007

 


 

serge-carfantan

 

 

Biographie succincte :

Serge Carfantan est docteur agrégé de philosophie, spécialiste de la philosophie indienne et de la pédagogie de la philosophie.

 

Il a enseigné à Bordeaux, Libourne, Parentis, Mont de Marsan, Pau et à l’université de Bayonne.

 

Ce texte a été écrit dans le cadre d’un cours sur le cynisme politique, dans lequel il s’inspire notamment des œuvres d’Aldous Huxley, le Meilleur des mondes, et de Gunther Anders, l’Obsolescence de l’homme.

 


 

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