Tumeur mammaire : Le profit ou la vie…

Time : 1 mn 18

 


 

Tumeur mammaire 

 Breast cancer OC blue

 

Le profit ou la vie…

 

 

 

D’où vient cet extrait vidéo ?

C’est un extrait de « Le Profit ou la vie », un documentaire qui dénonce les dérives de l’industrie pharmaceutique. Il date de 2003. L’extrait revient sur une affaire qui a beaucoup fait débat en 1996.

 

A l’époque, plusieurs chercheurs du laboratoire Roussel-Uclafs émeuvent de l’abandon de la recherche sur une molécule mise au point en 1992, appelée RU 58 668.

 

En juin, L’Humanité dénonce un renoncement «  pour de sordides questions financières  » alors que « personne, dans la communauté scientifique internationale, n’a sous-estimé les premiers résultats  ». Tout en précisant : « On peut objecter que les travaux de recherche sur le RU 58 668 n’ont jamais dépassé la phase préclinique, que les tests permettant de vérifier la tolérance humaine n’ont pas été réalisés. »

 

Le documentaire revient sur cette affaire en interrogeant l’un des salariés défenseurs de la molécule, Patrick Van de Velde, qui lance :

 

«  Je voudrais simplement vous expliquer un petit peu comment on a mené à bien cette expérience. En fait, c’est extrêmement simple : il suffit de prendre de la tumeur mammaire humaine que l’on implante chez la souris. Au bout de trois mois, chez les animaux témoins, on avait ces tumeurs-là, voyez, neuf tumeurs qui viennent de neuf souris – ça remplit entièrement mon flacon. Ça c’était les témoins qui ne recevaient aucun traitement. Ou alors on traitait avec notre produit, le RU 58668 : je pense qu’à la caméra on voit rien, parce que les tumeurs sont ici, voyez, dans le fond, elles sont 8 à 10 fois plus petites qu’au début du traitement. Ce produit-là, on l’a arrêté simplement parce que, derrière, y a des gens du marketing qu’ont dit “oui, mais voyez, 600 millions de chiffres d’affaires, c’est pas suffisant. Donc on arrête.” »

 

Radiographie cancer sein

 

Est-ce que tout est vrai ?

En juin 1996, une question est posée à ce sujet au secrétaire d’Etat à la Santé et à la Sécurité sociale, Hervé Gaymard. Réponse de l’intéressé :

 

« Le cours normal de la recherche pharmaceutique est de travailler sur un grand nombre de molécules en fonction de cibles thérapeutiques pour finalement, après plusieurs années de recherche et développement, aboutir parfois à un médicament, tandis que la plupart des produits sont abandonnés en cours de recherche. Dans ce cas particulier, il revient à l’entreprise de déterminer les suites à donner et les investissements à conduire sur la molécule RU 58668. »

 

En clair, Gaymard répond en gros que l’entreprise fait bien ce qu’elle veut avec ses molécules. C’est aussi le discours du président de Roussel-Uclaf, selon L’Humanité  :

 

« Jean-Pierre Godard, le président de Roussel-Uclaf, nous avait avoué à l’époque que la “question fondamentale” pour lui, c’était : “Où en est le besoin médical non satisfait, qui a un potentiel suffisamment attractif pour que je mette mon argent dessus ?” Pas attractif, le RU 58668 ? Il dispose pourtant de hautes potentialités pour faire régresser les tumeurs, mais aussi pour réduire les métastases. Jamais le divorce n’avait été aussi flagrant entre les besoins de santé et la course aux profits. Désormais, la seule obsession des dirigeants d’HMR, c’est de satisfaire l’appétit des fonds de pension américains. Objectif avoué, un taux de profit de 20% à 30% annuel ! »

 

Il semble bien que les recherches aient été arrêtées parce que les dirigeants ne croyaient pas en son potentiel commercial. Toute la question est de savoir si ce médicament était vraiment prometteur. Les suites de l’affaire depuis la diffusion du film aident à se faire une idée à ce sujet.

 

RU 58668

 

 

Que s’est-il passé depuis ?

Pour le savoir, nous avons interrogé Patrick Van de Velde. Celui-ci nous a répondu par mail :

«  J’ai quitté l’entreprise depuis 10 ans. Le produit a été arrêté il y a plus de 12 ans et je n’en ai plus jamais entendu parler ; le brevet est maintenant dans le domaine public mais comme aucune étude tox chez l’homme n’a été entreprise, à ma connaissance, il est hautement improbable qu’une entreprise pharmaceutique ait l’envie de se lancer dans des études de développement. Je n’aurai malheureusement pas d’information complémentaire à vous fournir et j’en suis désolé.  »

 

François Nique, collègue de Patrick Van de Velde et responsable du projet à l’époque, a quant à lui pu nous dresser un historique exact des recherches sur ce produit. Roussel-Uclaf a été l’objet de plusieurs rachats et fusions en quelques années, jusqu’à appartenir complétement au groupe Aventis, qui cesse les recherches sur le RU 58 668.

 

François Nique raconte ensuite :

« Après l’arrêt des recherches sur le RU 58668 par Aventis, le brevet couvrant ce produit a été transféré à une spin-off du groupe (société indépendante créée par le laboratoire pour se délester de certaines activités), créée en 2002 et principalement dédiée aux maladies osseuses. Quelques recherches complémentaires ont néanmoins été entreprises par une CRO sur le RU 58668, en particulier une étude pharmacologique sur le modèle de tumeurs mammaires induites par le DMBA (DiMéthylBenzAnthracène) chez le rat. C’est un modèle classique pour les antiœstrogènes dans lequel le RU 58668 n’a pas montré d’effet significatif. Par le jeu des fusions/acquisitions, la spin-off a changé de domaine d’activité et j’ai personnellement cessé toute activité professionnelle en 2009. »

 

Un autre ancien collègue confirme :

« Plusieurs modèles n’ont pas été concluants, et on a constaté de grosses différences de métabolisation de la molécule chez les animaux. Ça semble donc un peu dangereux de tenter une étude de tox chez l’homme, ce n’est pas rien, souvenez-vous de ce qui s’est passé à Rennes. Cette molécule est aujourd’hui dans le domaine public, on peut la développer sans payer de brevet. Personne ne le fait, il y a donc a une raison. S’il y avait de l’argent à prendre, des gens tenteraient le coup. Si j’étais le haut PDG d’un laboratoire, on me donnerait la molécule, je n’en ferais rien. »

 

Bref : c’est plus compliqué que prévu.

 

Cette affaire a fait grand bruit à une époque où de nombreuses dérives de l’industrie pharmaceutique sont constatées. Elle est donc devenue l’un des exemples incarnant le scandale aux yeux d’une partie de l’opinion publique. Pourtant, les recherches qui ont suivi ont montré que le RU 58668 n’était pas forcément le produit miracle annoncé. (1)

 

(1) FAUX !

 


 

Les chercheurs de Roussel-UCLAF sont bien placés pour porter cette appréciation : ils l’ont mise au point en 1992, après plus de dix ans d’un travail acharné. Nom de code de la molécule : le RU 58668. Elle représente un réel espoir pour les 800 000 femmes qui, chaque année, engagent un combat vital contre le cancer du sein, responsable de 200 000 décès par an. Et pourtant, le RU 58668 ne sera probablement jamais commercialisé. C’est du moins la décision prise par la direction de Roussel-UCLAF. Elle estime que cette molécule « ne présente pas un intérêt économique suffisant. ». 200 000 femmes à sauver chaque année, ça ne serait pas suffisamment rentable !

 

« Les évaluations effectuées prédisent un chiffre d’affaires compris entre 500 et 800 millions de francs par an. Ce chiffre est jugé insuffisant. », s’indigne l’un des chimistes, décontenancé, révolté. « Je ne néglige pas l’aspect économique, mais je ne peux accepter que notre produit dorme dans les tiroirs, alors que tant de femmes sont atteintes par cette maladie. »

 

On peut lui objecter que les travaux de recherche sur le RU 58 668 n’ont jamais dépassé la phase préclinique, que les tests permettant de vérifier la tolérance humaine n’ont pas été réalisés. Mais personne, dans la communauté scientifique internationale, n’a sous-estimé les premiers résultats. « Imaginez le potentiel fabuleux de cette molécule si elle s’avère aussi efficace sur l’homme. Je ne peux admettre que l’on n’effectue pas ces tests ultimes pour des raisons financières. L’aspect médical ne doit-il pas primer ? Et puis, il ne faut pas oublier que, chaque année, le groupe bat des records de bénéfices. Avec une partie de ces profits, on pourrait même se permettre de travailler à perte pour l’Afrique. », ajoute-t-il.

 


 

 

Cellule cancer sein

Breast Cancer Cell

 


 

In vivo, le RU 58 668 a montré une activité anti-utérotrophique totale chez la souris ou le rat sans présenter d’effet agoniste. De plus, le RU 58 668 était le seul composé anti-œstrogène testé jusqu’à présent capable d’induire une régression à long terme des tumeurs mammaires humaines MCF-7 implantées chez des souris nues, suggérant son utilisation potentielle pour le traitement du cancer du sein avancé.

 


 

Traitement contre le cancer 

100 Milliards de dollars de recettes par an !

 

 

Le chiffre est énorme. Ces 100 milliards de dollars de recettes sur le traitement contre le cancer ne sont pas de bonne augure pour espérer voir une réelle solution thérapeutique dans un futur proche. Les entreprises pharmaceutiques se gavent sur le dos de patients condamnés à devenir une source de revenus. Le malade est rentable, très rentable…

 


 

Roussel-Uclaf Logo

 

Aventis Logo

 


 

Molécule - Médicament

 


 

Source :

https://www.humanite.fr/node/133069

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21143970

http://www.senat.fr/questions/base/1996/qSEQ960616231.html

http://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/12002

http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/0960076094901449

http://jme.endocrinology-journals.org/content/40/3/101/F1.expansion.html

http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0928098703003208#BIB23

https://www.mieux-vivre-autrement.com/traitement-contre-le-cancer-100-milliards-de-dollars-de-recettes-en-2014.html

https://tempsreel.nouvelobs.com/rue89/rue89-planete/20160601.RUE3032/le-profit-ou-la-vie-d-ou-vient-cette-video-increvable.html

17 commentaires

  1. J’ai des problèmes d’estomac, du genre brûlures. J’ai de la difficulté à faire mes propres recherches. Mais, la molécule RU 58668 m’a l’air très prometteuse. Non, je ne dis pas que j’ai le cancer. Mais voyez l’anneau benzène rattaché à un HO ( que je crois être un monoxyde d’hydrogène?), l’anneau benzene peut être reconnu par les trois lignes intérieures. Ces trois lignes représentent un électron (ou plusieurs, je ne sais pas) supplémentaires. Ça agit un peut comme l’électricité alternative? Un ressort énergétique, si on veut. Bon, juste à côté, à gauche, on voit un hexagone qui n’a pas de lignes. Je ne comprends pas bien ce que cela peut signifier? Les lignes grasses (comme des cônes) veulent dire que la partie de la molécules fait une flexion par rapport au reste de la molécule. Décidément, une molécule fascinante. 😐

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      • Que voulez-vous dire, par la ‘source du graphique’ ? Moi ce dont je parle, c’est la molécule en elle-même. Était-ce le fond de votre pensée? Quoi qu’il en soit, j’ai pris le deuxième lien du bord. On peut quand-même dire ça des américains: ils permettent la libre circulations de certaines données et informations. Oui, ça a des pours et des contres. Mais sinon, ça serait pire, non?

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      • J’ai réfléchi à ça dans mon lit. Alors, voilà ma réflexion. Je crois que ces molécules agissent comme des petits couteaux vis-à-vis des cellules cancéreuses, mais pour les cellules saines, ils ne font que pincer. Parce que les cellules saines sont plus flexibles que les cellules cancéreuses. Qu’en pensez-vous?

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      • En chimie, diverses formules peuvent atteindre le même résultat, comme en mathématiques, non? Après, c’est une question de pureté. Il faut un procédé pour filtrer les molécules dont on ne veut pas? Je dis juste ça par intuition, j’ai un livre de chimie, mais je n’arrive pas à le lire, par manque de concentration. Et même si je le lisais, il y a des personnes plus doués que moi qui feraient un meilleur travail. Ça aiderait si la compagnie qui a trouvé ce genre de molécules, nous donnerait la recette. 😐

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      • Le brevet est en accès libre maintenant mais un coup de développement, etc., etc.. Coûtent extrêmement cher… Très cher ! Ils savent donc pertinent que seul le secteur industriel de la santé peut se lancer dans un tel projet mais ce n’est pas intéressant. Pour rapporter des dividendes aux actionnaires… Il vaut mieux être malade qu’en pleine forme. L’on parle ici d’un marché de plusieurs milliards de dollars…

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      • Est-ce que ça serait possible de financer avec des bitcoin, ou autre monnaie virtuelle de ce genre? MOi-même je n’en possède pas, je n’ai pas l’ordinateur qui faut. Et je regrette de ne pas avoir ‘miné’ des bitcoins au début des années 2010. Je serais maintenant millionnaire si j’avais su. 😦

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