Attali prévient : « l’Europe est condamnée à être dépecée, saignée et assassinée »

 

Jacques Attali

Jacques Attali, économiste, écrivain et haut fonctionnaire français (pour illustration)

 

 

L’élection européenne semble aujourd’hui pour beaucoup une figure imposée de la politique, où on demande à intervalles réguliers aux citoyens du continent d’aller voter pour des députés qu’ils ne connaissent pas, dont ils ne savent rien de l’action ; et qui ne sont, pour la plupart, que des gloires du passés ou des faux espoirs de l’avenir. Rien n’est plus vide de sens.

 

Cela l’est plus encore quand on sait qu’un tel Parlement sert surtout à participer d’une façon fictive au choix des membres d’une Commission et à l’établissement de lois, qui sont en fait, à la fin, des décisions des gouvernements nationaux, prises dans d’interminables et d’obscurs sommets.

 

Et plus encore quand on réalise que ces instances européennes, une fois en place ne s’occupent que de sujets économiques limités, dans une optique ultralibérale, qui encourage la compétition entre Européens, à tous les niveaux, poussant au moins-disant fiscal et social et ne faisant rien, ou presque rien, pour construire des projets communs.

 

Je ne dis « presque rien », parce que l’Union Européenne a quand même construit des projets communs qui méritent qu’on les soutienne, tels la PAC, Erasmus, Eureka, l’euro, la cour européenne de justice et quelques autres.

 

 

Il est temps de renverser la table, et de faire beaucoup plus, face aux principaux enjeux du monde :

 

Dans les dix ans qui viennent, les Etats-Unis et la Chine vont se renforcer dans les secteurs clés de l’avenir ; les Africains, les Indiens, les Russes, les Indonésiens, vont commencer à apparaître comme des concurrents et non plus seulement des clients. D’innombrables menaces écologiques vont croître. Des migrations innombrables vont se déclencher, dans un monde de plus en plus nomade. Et nous, Européens, ne pourront plus attendre de personne qu’on nous aide à nous défendre face à ces menaces et ces concurrences. Nous sommes devenus une proie et non plus un partenaire. Condamnés, si nous ne faisons rien, à être dépecés, saignés, assassinés. Sans que nul ne vienne à notre secours.

 

Alors, pourrions-nous en nous divisant nous défendre mieux ? Une France, une Allemagne, une Italie, une Espagne, une Hongrie seule pourrait-elle affronter ces périls ? Non évidemment. Il nous faut mettre en commun nos moyens de défense, notre police des frontières, nos moyens de recherche fondamentale et appliquée. Il nous faut changer notre politique de la concurrence pour favoriser la constitution de géants européens. Il nous faut harmoniser au plus haut nos protections sociales et notre fiscalité des entreprises. Il nous faut nous doter d’un budget d’investissement d’au moins 3 % du PIB de l’Union, en le réservant à la recherche, aux investissements technologiques, éducatifs, sociaux, agricoles, territoriaux et écologiques. Il nous faut modifier radicalement les conventions fiscales internationales qui limitent la base fiscale des GAFA et de leurs équivalents chinois.

 

Cette mise en commun des moyens de nous défendre nuira-t-elle à notre identité nationale ? Non évidemment. C’est très malhonnête de le prétendre. Cette mise en commun ne touchera ni à notre langue, ni à notre culture, ni à notre éducation, ni à l’autonomie de nos territoires, ni à notre conception de la laïcité. Surtout si la France consacre enfin les moyens nécessaires à la promotion de la Francophonie, si oubliée, si méprisée par tous les dirigeants et tous les diplomates, depuis cinquante ans. Elle nous permettra, en plus, de mieux défendre nos intérêts dans le monde, et de peser sur les grands enjeux écologiques, sociaux, financiers, éthiques, politiques mondiaux, dont nous sommes de plus en plus absents.

 

C’est de tout cela qu’il faut débattre maintenant. C’est cela que demandent toutes les jeunesses d’Europe, enviées de celles du monde entier. C’est à cela que des dirigeants audacieux, ayant le sens du long terme, le goût du risque, devraient, se consacrer. S’ils existent.

 

j@attali.com

 


 

Drapeau européen

Pour illustration

 


 

Source :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Attali

http://www.attali.com/geopolitique/pour-leurope-renverser-la-table/

https://blogs.lexpress.fr/attali/2019/03/03/pour-leurope-renverser-la-table/

https://news-europe.fr/europeennes-attali-previent-leurope-est-condamnee-a-etre-depecee-saignee-et-assassinee/23112/

https://lecourrier-du-soir.com/europeennes-attali-previent-leurope-est-condamnee-a-etre-depecee-saignee-et-assassinee/

 

Article :

L’Express

13 commentaires

  1. On peut voir les choses comme ceci, ou autrement. Maintenant nous connaissons son opinion.
    Cette description est celle de la situation que l’on a créé. Effectivement, libre à nous de continuer dans la même direction, de l’empirer, même. Mais on peut aussi considérer les évènements d’une autre façon, par exemple que le peuple, excédé par la tournure dramatique que prennent les évènements prenne les commandes et redresse la barre. Il y a des solutions pour tout mais elles ne sont pas employées, ce n’est pas de moi, c’est une personne qui passe tout son temps à essayer d’améliorer la situation qui l’a dit sur la radio nationale. Mais on s’en doutait. En fait « La vie va là ou se porte l’attention », là aussi ce n’est pas de moi et je souhaite que l’on tourne son regard du bon coté. Les « grands capitaines d’industrie, visionnaires » créent une situation florissante pour leur entreprise, pourquoi devrions nous subir en aveugle une situation défaillante ? Regardez ce que j’ai noté seulement ces derniers jours dans ma revue de presse. Nous avons vraiment de quoi rendre le monde agréable :

    Julia Cagé: une juste analyse de la situation!
    Pour sauver la démocratie, limitons le financement privé des partis politiques, suggère Julia Cagé car le plafond de 7500 euros est remboursé pour plus de 60% par les impôts de la plèbe! Autrement dit, c’est nous qui payons le financement octroyé par les riches aux partis politiques! Et évidemment comme ce sont les riches qui choisissent les destinataires…. Les partis de la vraie gauche font fissa ! Pour ceux là le financement est d’abord relevable des militants… Macron a été presque exclusivement été financé par des très riches… en partie financé par des évadés fiscaux! Sans doute en échange de quelques promesses!
    Lisez et écoutez Julia Cagé: son discours est vraiment éclairant!
    Dans : Par Jupiter le mercredi 6 mars 2019
    en 8 minutes de 2 minutes 54 à 10.10   :
    https://www.franceinter.fr/emissions/par-jupiter/par-jupiter-06-mars-2019

    Glyphosate et risques de cancer : la justice européenne impose l’accès aux études
    Dans un arrêt rendu ce jeudi 7 mars, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a estimé que l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) ne pouvait pas refuser la divulgation des études qui lui ont permis de conclure, en novembre 2015, que l’herbicide glyphosate ne présentait pas de risque cancérogène.
    https://www.actu-environnement.com/ae/news/cour-justice-europeenne-efsa-acces-etudes-ca

    La belle réponse de Peugeot à ses Gilets jaunes
    Le versement de la prime de performance et d’intéressement de PSA présente plusieurs vertus. Tout d’abord, elle relance le principe de la participation des salariés aux fruits de l’expansion si chère au Général de Gaulle. Par ailleurs, elle montre qu’une entreprise profitable et qui réussit ne bénéficie pas qu’à ses actionnaires comme on l’entend trop souvent. En clair que le profit n’est pas l’ennemi des salariés et qu’il vaut mieux travailler dans une entreprise en bonne santé que chez un canard boiteux.
    https://www.contrepoints.org/2019/03/07/338802-la-belle-reponse-de-peugeot-a-ses-gilets-jaunes

     « La preuve de l’après vie.
    « La conscience n’est pas une sécrétion du cerveau mais existe en-dehors »constatation faite par les médecins, les chercheurs. On vit tous, spécialement en Occident , en se disant que après la mort il n’y a plus rien, qu’il n’y a plus de conscience. Cette assertion n’est basé sur aucune certitude scientifique. On s’accorde dessus comme par un consensus, mais il n’y a aucune preuve qu’il y ai une vie après la mort, mais il n’y a aucune preuve qu’il n’ ai pas de vie après la mort. Ce qui est irrationnel est de ne pas y croire, c’est de se dire qu’il n’y a rien du tout , rien d’intéressant sur ce sujet là et que cela ne mérite pas d’examen. C’est une position de croyant, de croyant qui veut ne croire en rien du tout. »
     https://www.youtube.com/watch?v=htTomQZuexE&feature=youtu.be&t=458

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    • La dernière rubrique nous invite à considérer la vie dans un contexte plus grand que les seuls sujets économiques limités dans une optique ultralibérale, qui encourage la destruction de tout. Bien sur c’est à chacun de découvrir l’étendue de la vie qu’il veut considérer. Mais si nous n’étions pas contraint à ne considérer qu’une toute partie du monde uniquement matériel, cela irait déjà mieux. On tomberait rapidement sur certaines valeurs intéressantes comme le « civisme » par exemple :

      « Et surtout nous avons besoin d’un sens de l’intérêt général. Pas seulement pour les élus d’ailleurs, mais à tous les échelons de la société. Çà s’appelle le civisme. » Natacha Polony. Ajoutée le 29 mai 2017
      https://youtu.be/cMStNTs45nQ?t=254

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