Reconnaissance faciale France : C’est un outil de surveillance de masse qui va déshumaniser les rapports sociaux [Vidéos]

 

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INTERVIEW : Benjamin Sonntag, co-fondateur de la Quadrature du Net, explique à « 20 Minutes » pourquoi la mise en place de dispositifs de reconnaissance faciale un peu partout en France peut s’avérer très dangereuse pour les citoyens.

 


 

-. Les initiatives utilisant des dispositifs de reconnaissance faciale se multiplient aujourd’hui un peu partout en France.

 

-. La Cnil s’est opposée la semaine dernière à l’expérimentation du dispositif dans deux lycées à Nice et Marseille, et dans certains quartiers à Saint-Etienne.

 

-. « 20 Minutes » a interrogé Benjamin Sonntag, co-fondateur de la Quadrature du Net, association de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet, qui souhaite « une interdiction totale des dispositifs de reconnaissance faciale en France ».

 


 

L’inévitable débat sur la reconnaissance faciale arrive enfin en France. Loin des dispositifs déjà déployés en Chine, les initiatives pour favoriser l’utilisation de cette nouvelle technologie se multiplient aujourd’hui un peu partout en France. De nombreux projets ont ainsi émergé ces derniers mois à Toulouse, Valenciennes ou encore Metz. A Paris, la présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse souhaiterait également utiliser  la reconnaissance faciale dans les transports en commun pour lutter « contre la menace terroriste ». Mais il semblerait aujourd’hui que la Cnil, le gendarme français des données personnelles, ne soit pas encore prête à valider de tels dispositifs.

 

La Commission nationale informatique et libertés vient en effet de retoquer deux projets ayant recours à cette nouvelle technologie. Elle s’est opposée à la mise en place d’un système de reconnaissance faciale, un portique virtuel de contrôle d’accès, que souhaitaient expérimenter deux lycées à Nice et à Marseille (Paca). Elle a également émis un avis défavorable à la mise en place d’un système de reconnaissance sonore qui avait pour but de surveiller de manière permanente certains quartiers de la ville de Saint-Etienne (Loire). Les associations de défense des libertés individuelles, dont certaines avaient formé un recours contre ces dispositifs, sont soulagées, mais restent toutefois vigilantes. 20 Minutes a interrogé Benjamin Sonntag, co-fondateur de la Quadrature du Net, qui souhaite interdire l’usage de la reconnaissance faciale en France.

 

 

La Cnil a indiqué la semaine dernière qu’elle s’opposait à la mise en place d’un système de reconnaissance faciale dans deux lycées à Nice et à Marseille. Quels sont les principaux dangers de cette technologie ?

Il y a énormément de problèmes avec la reconnaissance faciale. J’aurais même envie de dire qu’il n’y a que des inconvénients. Déjà, ce qu’il faut savoir, c’est que ça ne marche pas ! Toutes les expérimentations qui ont été faites montrent qu’utiliser la reconnaissance faciale à des fins sécuritaires s’avère inefficace, voire même très dangereux. Ces machines sont incapables d’apporter la sécurité vantée par leurs promoteurs. Il faut donc arrêter de croire qu’elles vont pouvoir résoudre tous les problèmes.

 

Les dispositifs de reconnaissance faciale sont surtout un outil de surveillance de masse, de surveillance généralisée à la Big Brother. Ils exploitent votre visage – quelque chose que vous ne pouvez pas cacher – ce qui fait que vous êtes surveillé constamment dans l’espace public, sans pouvoir vous y opposer. Ces technologies biométriques augurent un réel changement de paradigme dans l’histoire de la surveillance. Ce sont des dispositifs totalement disproportionnés et liberticides…

 

 

La Cnil a également fortement recommandé à la mairie de Saint-Etienne de faire marche arrière sur un autre dispositif, des capteurs sonores installés dans les quartiers sensibles…

De tels projets et initiatives émergent malheureusement un peu de partout, qu’il s’agisse d’expérimentation de reconnaissance faciale, palmaire, sonore… Les hommes politiques qui souhaitent utiliser ce type de technologie ne comprennent même pas qu’ils sont dans le « solutionnisme technologique ». Ils pensent pouvoir régler des problèmes politiques et sociétaux avec de la technologie, sans se poser la question de savoir d’où viennent ces problèmes. Certains élus pensent que tout ce qui est moderne est formidable, et ne se posent même la question de savoir si ces outils vont vraiment apporter quelque chose à la société. Pour eux, c’est comme un jouet avec lequel ils ont envie de s’amuser, au détriment des libertés de chacun…

 

 

Y a-t-il déjà des dispositifs de reconnaissance faciale déjà en place sur le territoire français ?

Depuis plusieurs années, des entreprises développent et testent ces technologies grâce à l’accompagnement de l’Etat et à l’argent du contribuable. Le tout sans réel encadrement ni transparence. Nous avons lancé en septembre une campagne participative de recherche-action baptisée Technopolice.fr, qui commence à documenter les projets lancés au niveau national et local : à Paris, Nice, Marseille, Toulouse, Valenciennes et Metz notamment. Outre la reconnaissance faciale, d’autres applications greffées aux flux de vidéosurveillance et fondées elles aussi sur des techniques d’« intelligence artificielle » font déjà aussi l’objet d’expérimentations, comme l’analyse des émotions ou la détection de « comportements suspects ».

 

 

Selon vous, l’Etat et les industriels essayent d’imposer cette technologie dans notre société sans qu’il n’y ait eu de débat sur le sujet, et sans cadre juridique…

Il n’y a jamais eu de débat en France sur la reconnaissance faciale. Personne n’a encore eu de véritable réflexion sur le sujet. Pourtant, on essaye aujourd’hui de nous l’imposer, un peu partout, sans aucune transparence… L’Etat et les grands groupes industriels travaillent main dans la main pour élaborer sans cesse de nouveaux projets, sans en informer et en avertir les citoyens. On voit ça arriver comme un véritable char d’assaut dans nos vies. C’est un vrai sujet de société sur lequel nous devons avoir un réel débat démocratique. Quand on entend Cédric O [secrétaire d’Etat au numérique] dire qu’il faut « expérimenter la reconnaissance faciale pour que nos industriels progressent », je me dis qu’il va vraiment falloir que les politiques arrêtent de nous considérer comme des rats de laboratoire !

 

 

En plus d’une société de surveillance de masse, vous estimez que la reconnaissance faciale va avoir de terribles conséquences sur les rapports sociaux, et même sur l’environnement…

Sous couvert d’efficacité et de modernité, la reconnaissance faciale va conduire à déshumaniser encore davantage les rapports sociaux. On va habituer les gens à vivre dans une société délétère, où règne la défiance. Les gens se sentiront continuellement épiés, et n’auront plus confiance en personne, ce qui laissera malheureusement place à une paranoïa ambiante. D’autres effets plus pervers sont aussi à prendre en considération, notamment les effets sur l’environnement. On parle beaucoup aujourd’hui de l’impact environnemental des nouvelles technologies, ce sera quelque chose à prendre en compte à l’avenir, surtout dans une société de surveillance de masse…

 

 

Vous prônez donc une interdiction totale de la reconnaissance faciale en France ?

Ce que l’on souhaite aujourd’hui, c’est interdire sur tout le territoire les technologies de reconnaissance faciale, qu’elles soient à des fins privées ou publiques. Nous devons dire notre refus, face à l’offensive concertée de l’Etat et des industriels qui, à tout prix, cherchent à imposer cette technologie. Aux Etats-Unis, après les mobilisations citoyennes, plusieurs municipalités ainsi que l’Etat de Californie ont d’ailleurs commencé à en proscrire les usages policiers. Nous aussi en France, nous devons nous mobiliser pour éviter de vivre dans une société dans laquelle tous nos faits et gestes seraient contrôlés…

 


 

Time : 13 mn 46 / [1/2]

 


 

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Source :

https://www.laquadrature.net/

https://www.20minutes.fr/high-tech/2642419-20191104-reconnaissance-faciale-outil-surveillance-masse-va-deshumaniser-rapports-sociaux-estime-quadrature-net

 

Article :

Hakima Bounemoura / 20 Minutes

 

Vidéo :

[1] Reconnaissance faciale : la résistance s’organise – FRANCE 24 / YouTube

[2] Le face à face – La reconnaissance faciale en France – RT France

 

Photo :

Pour illustration

25 commentaires

    • Cela va beaucoup plus loin. Les raisons invoquées sont fallacieuses. C’est tout un agenda qu’il faut prendre dans son ensemble et remettre dans son contexte. Autrement dit : c’est l’arbre qui cache la forêt.

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  1. Ce qui est magique en France, c’est qu’avec la menace terroriste, on arrive à nous priver de nos libertés les plus fondamentales sans trop soulever de débats… Tôt ou tard, ce système passera, d’autant que le modèle chinois fait rêver nos dirigeants !

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  2. Ils m’amusent ceux qui font semblant d’ignorer par idéologie bohème mortifère, la situation catastrophique, des crimes et délits en france. Ces dans les postes de police pour porter plaintes le plus drôle, ils se plaignent des effets, dont ils chérissent les causes.

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  3. J’avoue qu’en Chine, où je vis, le système fonctionne bien. Nous sommes en totale sécurité à n’importe quelle heure du jour et de la nuit et dans quelques villes et quartier que ce soit. Maintenant il est vrai que ce n’est pas agréable de savoir qu’un Big Brother sache tout sur votre vie privée. En effet, la reconnaissance faciale couplée avec le positionnement géographique de votre mobile, de vos achats, etc. n’est pas agréable. C’est peut-être le prix à payer pour vivre en sécurité puisque l’on arrive pas à éradiquer ni le terrorisme ni les racailles.

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  4. Juste un sentiment..J’ai l’impression que nous passons d’un formatage à un autre, d’une habitude à une autre, sans même réfléchir. Cela doit être la TV, ces effets indésirables, de plus en plus toxique pour nos cerveaux. Nous ressemblons de plus en plus aux mignons montons de nos champs. .

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