Réforme des retraites : l’article 49.3, c’est quoi ? [Vidéos]

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Après 13 jours de débats, le Premier ministre Édouard Philippe a décidé d’avoir recours au 49.3 pour faire passer sa loi sur la réforme des retraites.

 


 

Le 49.3 décrypté

 

Edouard Philippe - 1

Édouard Philippe, Premier ministre / Pour illustration

 

 

 

Son utilisation entraîne la suspension immédiate de la discussion d’un projet de loi à l’Assemblée nationale. Depuis 1958, l’article 49.3 a été utilisé 89 fois.

 

« Désastreux » pour Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. « Un déni de démocratie » pour Damien Abad, président des députés Les Républicains. « Un des traits autoritaires de cette Constitution » d’après Alexis Corbière, député de La France insoumise. Mais c’est quoi exactement, le 49.3 ? Cet article de la Constitution permet au Premier ministre d’engager la responsabilité de son gouvernement sur un texte de loi.

 

 

La suspension immédiate de la discussion d’un projet de loi à l’Assemblée nationale

Son utilisation entraîne la suspension immédiate de la discussion d’un projet de loi à l’Assemblée nationale. Les députés ont alors 24 heures pour déposer une motion de censure, qui doit être débattue dans les 48 heures. Si la majorité des députés adoptent cette motion, le texte est rejeté le gouvernement est renversé. Sinon, le projet de loi est adopté sans vote des députés.

 

Ceux qui l’utilisent ont des arguments bien différents de ses pourfendeurs… « Ça n’est pas un acte d’autorité, c’est un acte d’efficacité pour l’économie et pour les entreprises françaises. Il faut aller vite, il faut réformer, c’est ce qu’attendent les Français », affirmait Manuel Valls le 16 juin 2015. « Je fais ce que d’autres avant moi ont fait, ce qu’Édouard Balladur a fait pour faire face à de l’obstruction, ce que Jean-Pierre Raffarin a fait pour faire face à de l’obstruction : j’utilise le 49.3 qui est une procédure parfaitement constitutionnelle », argue pour sa part Edouard Philippe.

 

 

Le champion du 49.3, c’est Michel Rocard

Depuis 1958, l’article 49.3 a été utilisé 89 fois : 32 fois par la droite, 56 fois par la gauche. C’est la première fois que le gouvernement actuel y recourt. Le 49.3 est souvent employé sur des textes controversés, comme la loi Macron en 2015 et la loi Travail en 2016. Cette procédure ne peut être utilisée que sur un projet de loi budgétaire ou une fois par an sur un autre texte.

 

Le champion du 49.3, c’est Michel Rocard, Premier ministre de 1988 à 1991, avec 28 utilisations en trois ans. Depuis 1958, une seule motion de censure a été adoptée, en 1962, contre le gouvernement de Georges Pompidou. Le 49.3 ne peut pas être utilisé devant le Sénat, puisque cette institution n’a pas le pouvoir de renverser le gouvernement.

 


 

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Edouard Philippe - 2

Édouard Philippe, Premier ministre / Pour illustration

 

 

En utilisant la procédure pour la réforme des retraites, le gouvernement alimente les critiques sur son autoritarisme et crée le malaise dans sa majorité.

 

En pleine crise sanitaire qui requiert unité et responsabilité, le gouvernement a pris le risque de déclencher une nouvelle tempête politique et sociale à propos de la réforme des retraites. Samedi 29 février, alors qu’un conseil des ministres exceptionnel avait été convoqué pour coordonner la gestion de l’épidémie de Covid-19, le premier ministre, Edouard Philippe, a demandé l’autorisation d’utiliser l’article 49.3 de la Constitution pour couper court au débat qui s’enlisait à l’Assemblée nationale.

 

Les opposants au texte ont aussitôt dénoncé « un coup de force » et pointé « le cynisme » du gouvernement qui n’a pas hésité à mélanger les deux sujets. Dans la foulée, la droite et la gauche, chacun de son côté, ont déposé une motion de censure, examinée mardi 3 mars à l’Assemblée nationale, en sachant qu’aucune des deux n’atteindra le seuil de la majorité absolue requis pour faire chuter le gouvernement.

 

Le projet de réforme est donc considéré comme adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, mais au prix d’une nouvelle crispation qui isole un peu plus le gouvernement.

 

 

Une logique d’affrontement

L’arme du 49.3 est, certes, une prérogative de l’exécutif garantie par la Constitution. Elle a été introduite en 1958 pour lutter contre l’instabilité ministérielle de la IVe République. Elle repose sur une logique de responsabilité : l’Assemblée nationale ne peut bloquer le fonctionnement des institutions sans risquer elle-même d’être dissoute. Depuis le début de la Ve République, 15 premiers ministres sur 23 ont dû y recourir, parfois à une cadence accélérée, parce que leur majorité était rebelle, insuffisante ou parce que l’opposition pratiquait l’obstruction avec la volonté manifeste de bloquer l’examen d’un texte.

 

C’est cette dernière raison qu’invoque, non sans raison, l’exécutif en soulignant le nombre d’amendements déposés – 41 888, dont une grande majorité par les députés de La France insoumise et du PCF. Ces deux partis n’ont pas caché leur volonté de mettre le gouvernement « échec et mat ». Le risque d’enlisement était donc réel, mais la responsabilité en incombe largement à l’exécutif qui, pour une question de calendrier, s’est enfermé dans une logique d’affrontement.

 

 

Une redoutable complexité

Lors de ses vœux aux Français, le 31 décembre, le président de la République avait mis la pression sur le gouvernement afin qu’il trouve la voie d’« un compromis rapide » sur une réforme qui devait « aller à son terme ». Dans la foulée, l’exécutif s’est fixé l’objectif d’une adoption définitive à l’été. C’était une erreur, car la réforme est d’une redoutable complexité. A chaque étape de son élaboration, elle a suscité une contestation qui n’était pas de nature seulement politique, mais aussi juridique.

 

Dans un tel état d’insécurité, il fallait miser sur le temps long pour espérer convaincre. Au lieu de quoi, l’exécutif a joué la montre en espérant en finir au plus vite et démontrer que sa main ne tremblerait pas. Il en résulte une exacerbation des tensions, en total décalage avec la philosophie de l’« acte II » du quinquennat, qui consistait à privilégier la concertation.

 

Aux vives critiques des oppositions sur l’autoritarisme et l’isolement de l’exécutif vient s’ajouter le malaise de la majorité, qui ne comprend pas comment la réforme des retraites, présentée durant la campagne présidentielle comme l’un des marqueurs du progressisme, a pu se transformer en un pur acte d’autorité.

 


 

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Edouard Philippe - Macron

Emmanuel Macron & Édouard Philippe / Pour illustration

 


 

Source :

https://www.cnews.fr/france/2020-03-03/quand-ete-utilise-larticle-493-699768

https://www.liberation.fr/france/2020/03/01/article-493-mode-d-emploi_1780155

https://www.vie-publique.fr/fiches/19494-le-recours-larticle-493-de-la-constitution

https://fr.wikipedia.org/wiki/Article_49_de_la_Constitution_de_la_Cinquième_République_française

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/03/03/le-mauvais-usage-de-l-article-49-3-de-la-constitution_6031659_3232.html

 

Article :

Brut / Le Monde

 

Vidéo :

[1] C’est quoi le 49.3 ? – Brut / YouTube

[2] 49.3 DE LA HONTE – LE GOUVERNEMENT S’ENFONCE – Le Fil d’Actu – Officiel / YouTube

[3] En 2016 Edouard Philippe dénonçait l’usage du 49.3 – La Tribune des Pirates / YouTube

[4] 49-3 sur la réforme des retraites : François Asselineau dénonce « le bal des faux-culs ». – Union Populaire Républicaine / YouTube

10 commentaires

  1. Le 49.3 est présenté comme un acte d’efficacité mais, bien que constitutionnel en effet, utilisé ici par ce gouvernement, c’est un acte d’autorité bien qu’il dise le contraire.
    Si on en est arrivé là, le premier responsable est le gouvernement et le président Macron. Après le long épisode des « Gilets Jaunes », le président a annoncé que la deuxième partie de ce quinquennat serait celui de la concertation. Il avait l’occasion de le prouver avec cette réforme des retraites. Il est vrai que la C.G.T. a tout fait pour bloquer les négociations. Il n’en reste pas moins que ce texte qui est un texte hautement important aurait dû être discuté à l’Assemblée Nationale durant au moins un mois et demi une connu le financement de ces nouvelles retraites.
    Or le gouvernement en ne laissant aux parlementaires que 3 semaines pour l’étudier a tout fait pour se mettre le Parlement à dos, un Parlement qui s’est senti insulté, dépouillé de son rôle de législateur. Il a prouvé son incapacité à présenter n texte abouti et relativement accepté par les syndicats : c’est un aveu de faiblesse. Face à ces négociations écourtées et à ce déni de démocratie, il fallait s’attendre à une réaction de l’opposition avec les amendements multipliés. Devinant que le texte ne serait pas voté avant un mois – un mois et demi, le gouvernement est passé en force, ce qui risque de lui coûter cher par la suite.
    Il est aussi regrettable de constater que les députés LaREM, à l’exception d’une minorité qui a fait preuve d’un certain courage et de dignité, aient oublié qu’ils étaient les élus de leurs électeurs et qu’ils les trahissaient en ne votant pas cette motion de censure. Ils ont préféré par calcul politique ou par peur d’être exclus se conduire en bons petits soldats : le doigt sur la couture du pantalon.

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