Doit-on se méfier de l’effet cocktail des résidus médicamenteux dans l’eau du robinet ?

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Pour nous et pour la nature, une gestion des eaux usées à revoir ?

 


 

Faut-il avoir peur de l’eau ? Celle qui coule dans les rivières et rejoint les océans ou les nappes phréatiques. Celle qui abreuve les cheptels et irrigue les cultures. Celle, même, que nous buvons au robinet…

 

Lentement mais sûrement, les eaux de nos lacs et de nos rivières, tout comme les nappes souterraines, se chargent petit à petit en… médicaments. C’est ce que nous rappelle la dernière campagne du groupe de Recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures et l’eau (Graie).

 

 

D’où viennent ces molécules ?

 

Voies d’arrivée des résidus de médicaments dans les milieux aquatiques. Crédit : Graie

 

 

Comme on peut le voir sur ce schéma, les médicaments qui se retrouvent dans les eaux proviennent de nombreuses sources. Mais la plus grande quantité provient des excrétas (urine, fèces).

 

Ceux qui proviennent des humains passent par des centrales d’épuration, ce qui n’est pas le cas des résidus issus de l’élevage qui peuvent rejoindre l’environnement soit directement par le biais des excréments animaliers dans le cas du pâturage, soit par épandage du fumier ou des lisiers.

 

 

Quelles sont les molécules concernées ?

Ces molécules que l’on retrouve dans l’environnement ont plusieurs origines. Certaines molécules sont données aux animaux d’élevage à des fins thérapeutiques, préventives ou pour favoriser la croissance.

 

Pendant longtemps les éleveurs ont fait un usage important d’antibiotiques sous forme d’additifs alimentaires. En 1999, on estimait ainsi qu’en Europe la consommation animale était du même ordre de grandeur que la consommation humaine. Depuis l’usage des antibiotiques a été réglementé. Malgré tout, l’élevage est probablement une source très importante de résidus pour cette classe de médicaments, comme pour d’autres.

 

Mais on retrouve également dans les rivières des molécules destinées aux humains. Soit parce que le dosage pris est trop fort (et que l’organisme n’a pas le temps de tout métaboliser durant le transit du médicament), soit parce qu’une partie seulement des molécules thérapeutiques est transformée par voie biochimique. Une partie provient également des médicaments périmés jetés dans les toilettes, les lavabos, ou les poubelles.

 

 

 

 

Tous ces médicaments ainsi que leurs produits de dégradation (métabolites) se retrouvent dans l’eau. 

 

 

En quelles concentration les trouve-t-on ?

Même à des concentrations infimes, ces molécules ont des effets mesurables sur certaines espèces (poissons et batraciens notamment).

 

 

 

 

Quels sont les effets ?

Plusieurs études ont mis en évidence des altérations de populations aquatiques reliées de façon certaine à la présence des substances actives dans l’eau, parmi lesquelles :

 

– Des effets sur la reproduction des animaux (poissons, batraciens, mammifères marins), pouvant aller jusqu’au changement de sexe et associés à la présence d’œstrogènes

 

– Des modifications des populations bactériennes, avec en particulier un développement des bactéries résistantes aux antibiotiques, associées à une pression de sélection due à la présence permanente d’antibiotiques dans l’eau

 

– Des modifications du comportement de poissons, par exemple perches rendues plus agressives du fait de la présence d’un antidépresseur (oxazepam) dans l’eau ; etc.

 

 

 

 

Des chercheurs canadiens de l’université de Montréal viennent ainsi de mettre en évidence, dans le fleuve Saint-Laurent, des molécules utilisées contre le cholestérol, l’hypertension ou le cancer. Une « pharmacie à ciel ouvert », rapporte Radio-Canada.

 

De nombreuses études, aux Etats-Unis, au Brésil, en Allemagne, en Italie, en Grande-Bretagne, en Finlande ou en France, décrivent des situations similaires.

 

« La présence de traces de substances médicamenteuses ou de leurs dérivés a été largement établie à l’échelle mondiale, en particulier dans les eaux superficielles et souterraines, dans les eaux résiduaires, dans les boues des stations d’épuration utilisées en épandage agricole et dans les sols », souligne l’Académie nationale de pharmacie française dans un rapport rendu à l’automne 2008. Toutes les eaux sont contaminées, y compris celles « destinées à la consommation humaine ».

 

L’origine de cette pollution est double. Elle provient, d’une part, des urines et des selles humaines – ainsi que de celles des animaux de compagnie – évacuées dans les eaux domestiques, où se retrouvent aussi des médicaments non utilisés dont, malgré les systèmes de collecte, une partie est directement jetée dans les toilettes ou les égouts. Elle résulte, d’autre part, des rejets de l’industrie chimique et pharmaceutique, des élevages industriels d’animaux et des piscicultures – gros consommateurs d’antibiotiques et d’hormones de croissance -, mais aussi, paradoxalement, des hôpitaux.

 

Ces derniers, qui utilisent en grande quantité non seulement des médicaments, mais aussi des molécules de diagnostic et des réactifs de laboratoire, sont les principaux responsables de la dissémination de produits anticancéreux et radiopharmaceutiques, qui se retrouvent, avec les excréments des malades, dans leurs effluents.

 

Une étude, conduite par l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset), a montré que des molécules anticancéreuses très actives, présentant « un danger potentiel pour la santé humaine et l’environnement », sont présentes « à des quantités non négligeables » dans les effluents hospitaliers, mais aussi en aval de la station d’épuration qui recueille ceux-ci.

 

Ce sont donc des eaux chargées en traces d’antibiotiques, d’anticancéreux, d’analgésiques, d’antidépresseurs, d’anti-inflammatoires, d’hormones ou de bêta-bloquants qui retournent dans les ruisseaux, les rivières et les eaux souterraines, où ces molécules se diluent, sans toutefois disparaître. Si bien qu’elles se retrouvent ensuite dans les réseaux d’eau potable et à la sortie du robinet.

 

 

Quels sont les risques pour la santé humaine ?

Les effets de l’ingestion régulière de faibles doses sur une longue période – toute une vie -, ainsi que du mélange des molécules dans un « cocktail thérapeutique » incontrôlé, sont aujourd’hui totalement inconnus.

 

Chez certains poissons, des substances médicamenteuses, en particulier hormonales, peuvent provoquer une altération des caractères sexuels, voire un changement de sexe.

 

Une surveillance s’impose, « notamment pour les populations les plus sensibles comme les enfants ou les femmes enceintes », estime l’Académie de pharmacie. Elle préconise, face à un « problème mondial », une véritable « politique de prévention ».

 


 

L’effet cocktail des polluants de l’eau du robinet serait source de cancers

 

Futura Sciences

 


 

Source :

http://politiquedesante.fr/medicaments/

http://www.graie.org/eaumelimelo/Meli-Melo/Questions/Les-medicaments-dans-l-eau/

https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/7-choses-a-savoir-sur-la-presence-de-medicaments-dans-l-eau_14568

https://www.lemonde.fr/planete/article/2009/02/02/l-alarmante-pollution-de-l-eau-par-les-medicaments_1149551_3244.html

 

Article :

Erwan Lecomte / Sciences et Avenir

Pierre Le Hir / Le Monde

 

Note : 

Ces articles datent respectivement de 2009 et 2014. Je vous laisse donc imaginer la situation sanitaire en 2021.

 

Vidéo :

[1] Doit-on se méfier de l’eau du robinet ? – Investigations et Enquêtes / YouTube

 

Photo :

Pour illustration

 

Voir notamment :

Eaux en bouteilles radioactives [Vidéo]

Du poison dans l’eau du robinet ! [Vidéos]

L’insoutenable vérité et mensonges de l’eau – Jacques Collin [Vidéos]

Eau du robinet : présence de pesticides perturbateurs endocriniens, cancérigènes et mutagènes

France : Des milliers de cours d’eau sont rayés des cartes hydrographiques, et s’ouvrent aux pesticides